Patrimoine de la région Wallone
SERVICE EXTERIEUR DE LA PECHE
Réhabilitation du saumon en Wallonie
Projet " Meuse saumon 2000 "
Sur les 41 espèces indigènes de poissons qui constituent le patrimoine originel de la région wallonne, 8 grands migrateurs anadromes (poissons qui quittent la mer pour venir frayer en eau douce) ont disparu. Les plus connus sont l'esturgeon, la truite de mer et le saumon atlantique.
Les causes de disparition de ces espèces sont les suivantes :
- l'édification sur les cours d'eau de barrages infranchissables pour les poissons;
- les pollutions diverses engendrées par les rejets d'eaux usées domestiques et industrielles;
- l'altération et/ou la destruction des habitats des poissons suite aux travaux (rectification, dragage, bétonnage des
berges, ...) exécutés sur les cours d'eau. - les prélèvements excessifs par la pêche professionnelle;
- le braconnage.
Avec la disparition des saumons migrateurs (le dernier saumon fut pêché en 1942 dans la Meuse à Visé) et malgré un effort de protection entrepris par les pouvoirs publics belges et hollandais, tout espoir de revoir ces espèces semblait complètement utopique.
Toutefois, lors d'une pêche électrique effectuée en juin 1983 dans la basse Berwinne à Lixhe près de Visé, quatre spécimen de truite de mer furent capturés. Par la suite, d'autres individus furent identifiés en différents endroits sur la Meuse et ses affluents. Ce retour des truites de mer fut confirmé par des captures d'adultes et de jeunes individus dans la Meuse hollandaise.
La réapparition de ce poisson donna l'idée de restaurer le cycle de vie de son proche parent, le saumon atlantique. Ce projet, proposé en 1987 dans le cadre de l'Année Européenne de l'Environnement et qui a reçu le nom de " Meuse Saumon 2000 ", est mené conjointement par l'Université de Liège, les Facultés Notre-Dame de la Paix à Namur et le Service de la Pêche du Ministère de la Région wallonne.
Cinq rivières à saumon
Sur la base des exigences écologiques de l'espèce saumon (eaux rapides, bien oxygénées, gravières, ...), 6 rivières ont été choisies pour réaliser des repeuplements expérimentaux : l'Ourthe et ses affluents, l'Aisne, le Basse Amblève, la Semois et ses affluents, la Lesse et le Samson. Deux autres rivières, la Berwinne et la Méhaigne, ont également fait l'objet de repeuplements mais uniquement en truites de mer.
Des saumons en pisciculture
Le saumon ayant complètement disparu de nos rivières, les repeuplements sont effectués à partir d'oeufs de géniteurs d'origine sauvage en provenance de France, d'Ecosse ou d'Irlande. Après avoir été acheminés par avion jusqu'à Zaventem, ils sont conduits à la pisciculture du Service de la Pêche à Emptinne.
Les saumons et les truites de mer (ces dernières provenant de géniteurs sauvages pêchés en Meuse hollandaise) sont élevés selon des méthodes proches de celles utilisées pour la truite de rivière. Toutefois, une plus haute technicité est requise. L'incubation se fait sur claies munies d'un substrat de ponte, dans de l'eau de source à une température constante de 9-10°C. Après adaptation à l'alimentation artificielle, les alevins de 2 cm sont transférés dans des bassins en polyester de 200 à 1500 litres placés sous serre et alimentés avec de l'eau d'étang à une température de 16-20°C en été.
La majorité des saumons quittent la pisciculture en juin-juillet quand ils atteignent la taille de 3-6 cm (3-4 mois). Cependant, plusieurs milliers de sujets sont maintenus en élevage jusqu'à l'automne (taille 8-12 cm) et un petit lot de tacons (jeunes saumons) est gardé jusqu'au printemps suivant pour produire des pré-smolts (10 -15 cm).
Afin de suivre leur migration à la dévalaison (descente vers la mer) comme à la future montaison (remontée des adultes vers les zones de frai), les saumons sont, avant d'être déversés, marqués au moyen des techniques suivantes : ablation de la nageoire adipeuse, cryomarquage à l'azote liquide ou micromarquage magnétique.
Pour en savoir plus : Site web de LA PISCICULTURE D'EREZEE
Des saumons qui sont suivis
Le suivi scientifique des repeuplements est réalisé par l'Université de Liège et les Facultés Universitaires Notre-Dame de la Paix.
Il consiste à étudier, par pêche électrique :
- la densité de population;
- le taux de survie;
- la croissance en longueur et en poids des jeunes saumons.
Ce suivi a permis d'établir que, dans la plupart des cas, les jeunes saumons s'adaptent très bien à leur rivière d'accueil. Les zones favorables à leur développement sont colonisées par des populations denses; leur croissance est rapide, surtout dans l'Ourthe, dans la Lesse et dans la Semois où l'eau est plus chaude (un jeune saumon de moins d'un an grandit de 20 mm/mois dans l'Ourthe, de 12 mm/mois dans le Samson).
En outre, depuis 1990, un piège à la dévalaison est installé chaque année de mars à mai dans le Samson pour y dénombrer les saumoneaux descendant vers la mer. De 1990 à avril 1995, le piège a permis de capturer 19% du lot de pré-smolt déversés, 8% du lot de tacon et 2% du lot d'alevins.
Quel avenir pour le saumon ?
Malgré ces résultats prometteurs, ne chantons pas victoire trop tôt. En effet, sur la Meuse, les nombreux barrages (22 de Hastière à l'embouchure de la Meuse en Hollande), même s'ils sont équipés d'une échelle à poissons, constituent tous des obstacles plus ou moins importants à la migration de montaison des poissons. En Belgique, ces échelles accumulent de nombreux défauts : manque d'attractivité, inefficacité totale, mauvaise situation, problèmes de structure. Par ailleurs, les 6 centrales hydroélectriques entre Namur et la frontière belgo-hollandaise sont la cause de mortalités (environ 5% par centrale) des jeunes smolts qui dévalent vers la mer. Des études sont en cours pour mettre au point une passe à la dévalaison.
Les mêmes problèmes existent sur l'Ourthe : 27 obstacles entre le barrage de Nisramont et la confluence de Liège, dont trois sont infranchissables pour les poissons.
Récemment, le Ministère wallon de l'Equipement et des Transports a débuté la construction sur le barrage de Lixhe, d'une passe à poissons moderne équipée d'un piège de capture et d'une chambre d'observation. L'aménagement du barrage de Monsin est d'ores-et-déjà programmé.
Le retour du saumon ?
Les résultats obtenus en taux de survie et croissance des alevins en eau douce encouragent à persévérer. Même si jusqu'à présent aucun saumon adulte n'a été capturé en Belgique, la prise de 23 saumons atlantiques adultes en Meuse hollandaise entre 1993 et 1996, constitue un heureux présage.
Sur la Meuse en Hollande, il existe également de nombreux obstacles : les barrages anti-tempête dans l'estuaire et 7 barrages de navigation. Dès 1984, les pouvoirs publics hollandais ont programmé d'équiper leurs 7 barrages mosans avec de grandes passes à poissons de contournement. Cinq passes sont aujourd'hui fonctionnelles et les deux dernières, dont celle de Borgharen à Maastricht avant l'entrée en Belgique, devraient être terminés en 1998. La voie de migration sera alors libre entre la mer du Nord et notre région.
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